Suisse
Le mois de mars s'est caractérisé par une très grande sécheresse (10% des précipitations du mois de mars de l'année dernière d'après MétéoSuisse); mais heureusement, la pluie est tombée dans les derniers jours. C'est important en ce début de période de végétation.
Une nouvelle tranche des contingents de céréales panifiables a été débloquée début avril. Et à nouveau, l'intégralité des quantités a été dédouanée en quelques minutes; les besoins de produits importés restent très élevés. Les droits de douane sur les céréales panifiables ont pour la troisième fois été nettement réduits pour faire face à la forte hausse des prix internationaux; ce mécanisme de protection à la frontière a donc un effet d'amortisseur sur les prix dans le pays. Alors que l'automne dernier, le montant maximum des prélèvements à la frontière était de CHF 23.38/100 kg, il ne sera plus que de CHF 5.81/100 kg à partir d'avril. Il s'agit là d'un montant historiquement bas, qui s'explique par la situation internationale extraordinaire.
Le Conseil fédéral a été étonnamment rapide dans sa prise d'une décision qui a permis d'y voir plus clair en ce qui concerne l'approvisionnement en céréales panifiables: à la demande de swiss granum, le contingent tarifaire des céréales panifiables a été relevé de 40 000 tonnes afin de permettre de couvrir les besoins du pays de façon ciblée grâce aux importations (plus d'informations dans le communiqué de presse).
UE/Monde
L'actualité de ces dernières semaines a été très clairement dominée par la guerre en Ukraine. Au-delà des maux et des ravages causés par l'agression brutale de la Russie, cette guerre révèle l'importance que revêt aujourd'hui la région de la mer Noire pour l'approvisionnement alimentaire mondial. Selon de nombreuses sources, la Russie pourrait poursuivre en Ukraine des objectifs stratégiques portant aussi sur les céréales. En effet, si la Russie prenait le contrôle de la région côtière, l'Ukraine perdrait tout accès direct à la mer et tomberait alors, comme le Kazakhstan, sous sa dépendance. Les céréales pourraient devenir une arme entre les mains de la Russie, comme l'a fort justement fait remarquer Oleksandr Perekhozhuk dans un article du journal allemand Agrarzeitung.
Le proche-Orient et l'Afrique du Nord étaient jusqu'à présent fortement dépendants des céréales ukrainiennes et russes. Les transports en provenance de la mer Noire sont aujourd'hui pratiquement à l'arrêt à cause de la guerre, même si des chargements sont à nouveau en cours sur des bateaux russes.
C'est la raison pour laquelle l'Égypte p. ex. est en train de mener des discussions avec l'Argentine, l'Inde, la France et les États-Unis pour pouvoir assurer ses futures importations de blé. L'Inde semble pouvoir être en mesure de prendre la relève jusqu'à un certain point.
Avec les combats qui continuent de faire rage en Ukraine, il faut s'attendre à des récoltes en nette baisse cet été pour les différentes cultures. Il est donc à craindre que la situation de l'approvisionnement reste très tendue au niveau international pour la prochaine récolte, avec un niveau des prix toujours très élevé.
Bio
On n'observe aujourd'hui que peu de différence entre les prix des céréales bio et ceux des céréales conventionnelles. Les exploitations fourragères européennes tirent elles aussi les prix vers le haut car leurs besoins ne sont couverts que pour une courte durée et elles doivent compenser la soudaine disparition des livraisons en provenance d'Ukraine en faisant appel à des producteurs d'autres régions.
Quant à savoir combien le facteur "Ukraine" va peser sur les prix de la nouvelle récolte, la réponse à cette question dépend de nombreux paramètres.
La récolte en Suisse a été historiquement mauvaise l'année dernière en raison des mauvaises conditions météorologiques. Afin d'assurer l'approvisionnement suisse, Bio Suisse a décidé d'autoriser jusqu'à fin août 22 l'ajout de blé au Bourgeon européen au stade de la mouture dans une proportion limitée à 20% au maximum sans que la farine ne perde le label Bourgeon suisse (plus d'information dans le (communiqué de presse).
Blé dur
La situation de l'approvisionnement reste tendue sur le marché du blé dur, même si des quantités apparaissent encore ici ou là. Les fournisseurs se tiennent pour l'instant sur la réserve en ce qui concerne leurs offres sur la nouvelle récolte.
Il va falloir maintenant observer ce qui va se passer en avril avec les semis de blé dur dans les régions de culture des zones frontalières USA / Canada. Deux questions se posent: les sols seront-ils suffisamment humides? Et sur quelles cultures les agriculteurs vont-ils miser au vu de la situation sur les marchés?